La Dépréciation de la Gourde une tendance lourde dans le cadre de la politique monétaire conduite par la BRH.
Dr Eddy Labossière
8/11/2022.
I- Dans sa conférence de presse du lundi 22 Août 2022, le Gouverneur de la BRH annonça que « de l’ordre sera mis sur le marché des changes afin de rapprocher les taux de change du secteur informel de celui du formel »;
Le Gouvernement paraissait choqué face à la désintermediation financière c’est-à-dire le basculement de l’intermédiation financière du secteur formel au secteur informel car, ce dernier offre des gains très juteux;
Le Gouverneur avait même mentionné le possible « éclatement de la bulle spéculative » et en proposant des mesures pour agir simultanément sur l’offre et la demande bien sûr du Dollar Américain. La finalité est de stopper bien sûr la dépréciation continue et régulière de la monnaie Nationale qui est la Gourde.
Pour corriger ces dérapages sur le marché des changes au 30 septembre 2022, la BRH en a injecté plus de 150 millions de Dollars Américains, de plus elle a augmenté le Coefficient de réserves obligatoires sur les passifs en monnaies à 53%, et la circulaire 88-1 a été modifiée de façon à rendre plus chers les taux d’intérêt sur les lignes de crédit.
Au 7 novembre 2022, le taux de référence de la BRH a atteint 129,0846 pour un Dollar Américain contre 125,60 pour un Dollar Américain le 29 octobre 2022.
Sur une semaine la Gourde a perdu 4 points de pourcentage.
Pour ce lundi 7 novembre 2022, le taux de change sur le marché formel Bancaire est d’un Dollar Américain pour 129,08 Gourdes
Et sur le marché informel le taux de change est d’un Dollar Américain pour 140 Gourdes.
II – La BRH n’a pas atteint son objectif car, la Gourde continue sa dépréciation;
De plus, le différentiel des taux entre les deux marchés formel et informel est de plus de 10 points de pourcentage, l’objectif de la BRH pour réconcilier les deux taux a échoué;
Quand une Banque Centrale passe à côté de ses objectifs, elle perd à la fois de sa crédibilité et même de son efficacité;
Il y a des conséquences pour une Banque Centrale qui perd sa crédibilité, dans le contexte Haïtien ça peut se traduire par le fait que les banques commerciales et autres institutions financières ne prendront pas au sérieux et ne mettront pas en application les mesures et circulaires de politiques monétaires prises par le BRH les concernants. D’ailleurs, lors de la conférence du 22 août 2022, le Vice- Gouverneur se plaignait et disait que : » des mesures prises par la BRH peuvent avoir été contournées par des opérateurs de l’informel… »
CONCLUSION: Deux conseils à la Banque Centrale de mon pays
I- Il est vrai que la mission d’une Banque Centrale est la stabilisation des prix dans une économie donnée, combattre l’inflation et quand le taux d’inflation augmente, pour le faire baisser, la Banque Centrale augmente à son tour son taux directeur et vice-versa;
En Haïti on y ajoute implicitement à la mission de la Banque Centrale celle de la stabilité de la gourde, pour y arriver, la BRH utilise souvent l’un des cinq instruments à sa disposition pour conduire la politique monétaire du pays qui est l’injection des Dollars Américains sur le marché des changes pour soutenir la Gourde (Opérations de marché ouvert);
Pour le seul exercice fiscal 2021-2022 la BRH a injecté plus de 350 millions de Dollars Américains, tirés de ses faibles réserves Internationales. En dépit de cette intervention, ça n’a pas empêché la dépréciation de la Gourde, il s’agit là d’une perte considérable pour un pays aussi pauvre qu’Haïti;
Si nous considérons la décennie 2010- 2020 le pays a perdu plus de 8 milliards de Dollars Américains dans ces opérations de marché ouvert menées par la BRH afin de stopper la dépréciation de la Gourdes;
Les Banques Commerciales ont été les vraies Bénéficiaires de cette manne financière pour aucun service réellement rendu.
Je vous invite à faire un petit calcul en termes de coût d’opportunité de ces 8 milliards de Dollars Américains:
Disons la construction d’une aciérie pour 1,6 milliards de Dollars Américains, une cimenterie pour 1,3 milliards, 2 milliards pour l’agro-industrie, 3,1 milliards pour une usine de raffinage de pétrole brut etc.
MAIS J’AI OUBLIÉ , LES POLITICIENS MAFIEUX, RAKÉTÈ ET LES OLIGARQUES CORROMPUS » tap gentan touye nou » et ces projets ne verraient jamais le jour sur la terre d’Haïti;
Pour l’exercice 2022-2023, je conseille à la BRH d’utiliser cette somme, soit les 350 millions de Dollars Américains pour participer à l’architecture financière ou la structure du capital ou la surface financière d’une Banque de développement et d’investissement, qui est le seul instrument ou mieux la seule stratégie viable devant favoriser l’inclusion financière en Haïti et pour finir une fois pour toute à l’apartheid financier dans le pays de Dessalines.
II- la BRH doit changer son modèle ou la méthodologie utilisée pour calculer son taux de référence journalier (Voir mon article du 10/31/2022 pour les calculs).