Changer la Constitution est-elle une aberration?

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Changer la Constitution est-elle une aberration?

Pourquoi envisager la suppression de la Constitution de 1987 ?Une analyse critique du rapport du Groupe de travail sur la révision constitutionnelle par le professeur de droit constitutionnel Sonet Saint-Louis

En 1995, aprĂšs une analyse approfondie et une rĂ©flexion sur la Constitution de 1987 largement adoptĂ©e par le peuple haĂŻtien, la professeure de droit constitutionnel, Dr. Mirlande H. Manigat, a lancĂ© son plaidoyer en faveur d’une nouvelle constitution. Elle a estimĂ© que le texte comportait trop de confusions, d’ambiguĂŻtĂ©s, d’imprĂ©cisions et mĂȘme de contradictions. Son travail, tout comme celui de nombreux autres, doit ĂȘtre envisagĂ© dans le cadre d’un vĂ©ritable amendement du texte fondateur de 1987.

Concernant le destin de notre loi fondamentale, les avis sont partagĂ©s. Le prĂ©sident RenĂ© PrĂ©val, sous la prĂ©sidence duquel le premier amendement constitutionnel a eu lieu, avait dĂ©clarĂ© que la Constitution de 1987 Ă©tait source d’instabilitĂ©. Le dernier prĂ©sident Ă©lu sous l’égide de cette constitution, Jovenel MoĂŻse, qui avait tentĂ© de la supprimer, partageait le mĂȘme avis.

Les premiers amendements du texte originel sont intervenus sous l’ administration du PrĂ©sident RenĂ© PrĂ©val en 2011. Ceux-ci ont permis Ă  RenĂ© PrĂ©val de mener Ă  bien son projet inavouĂ© d’instaurer un pouvoir oligarchique en HaĂŻti, en limitant ou en retirant la participation du peuple dans certaines instances dĂ©cisionnelles. Par exemple, dans cet amendement, les AssemblĂ©es dĂ©partementales ont Ă©tĂ© Ă©cartĂ©es de la formation du Conseil Ă©lectoral provisoire. Il en est de mĂȘme pour les AssemblĂ©es territoriales qui devaient jouer un rĂŽle clĂ© dans le choix des juges de nos diffĂ©rentes instances judiciaires. Ce projet des Ă©lites d’Ă©carter le peuple dans toutes instances dĂ©cisionnelles du pays est, aujourd’hui plus jamais, Ă  l’Ɠuvre Ă  travers toute une machination politique de l’Ă©lite dirigeante en dehors de toutes les prĂ©occupations de la population.

Il est Ă©vident que le texte de 1987 comporte des lacunes. Une constitution est Ă  la fois une Ɠuvre technique et juridique, et non une poĂ©sie faisant appel Ă  la beautĂ© et au style poli. Une constitution doit respecter des critĂšres de clartĂ© et de prĂ©cision. Avant tout, elle doit ĂȘtre conçue en fonction des aspirations profondes de la nation. Elle doit se dĂ©velopper en dehors de toute influence externe, qui pourrait aller Ă  l’encontre de nos sensibilitĂ©s culturelles, de nos rĂ©alitĂ©s historiques et sociologiques. Elle doit ĂȘtre Ă  la hauteur de nos ambitions. Bref, la Constitution doit imprĂ©gner l’esprit du peuple.

De plus, une constitution est faite pour ĂȘtre exĂ©cutĂ©e. Pour ce faire, il faut que nous nous dotions des moyens politiques et Ă©conomiques nĂ©cessaires pour l’appliquer. MalgrĂ© ses dĂ©fauts intrinsĂšques, ce texte n’a jamais Ă©tĂ© mis en Ɠuvre de maniĂšre adĂ©quate par les gouvernants chargĂ©s de sa mise en application. Quelle loi a-t-elle rĂ©ellement Ă©tĂ© appliquĂ©e correctement en HaĂŻti depuis nos deux siĂšcles d’indĂ©pendance ? Pourquoi donc, mĂȘme des lois jugĂ©es excellentes, n’ont-elles jamais Ă©tĂ© correctement appliquĂ©es ? DerriĂšre cette rĂ©forme se cache toute la dĂ©faillance des Ă©lites dominantes et dirigeantes d’HaĂŻti qui ont pillĂ© la rĂ©publique et l’ont conduite vers sa chute finale. En moins de trois dĂ©cennies aprĂšs l’exil des Duvalier, le sol haĂŻtien a Ă©tĂ© le thĂ©Ăątre de trois interventions militaires Ă©trangĂšres. Quelle dĂ©gĂ©nĂ©rescence ! Quelle dĂ©chĂ©ance ! Combien l’ampleur de cette faillite d’idĂ©aux est dĂ©solante !

Des Ă©lites mangeuses de constitutions
En quoi les ambiguĂŻtĂ©s, les imprĂ©cisions et les contradictions de notre constitution sont-elles responsables de la mauvaise gouvernance du pays, du pillage des caisses publiques, de l’ascension des plus corrompus Ă  la tĂȘte des affaires publiques, ainsi que de l’insĂ©curitĂ© et du climat de chaos dans lequel les Ă©lites politiques nous ont plongĂ©s ? En seulement deux siĂšcles d’histoire, ceux qui violent les lois et les constitutions ont Ă©laborĂ© vingt-trois (23) constitutions. Nous sommes devenus un laboratoire qui produit des constitutions.

Cette rĂ©alitĂ© brutale traduit non seulement un problĂšme de gouvernance politique, mais aussi un refus des Ă©lites haĂŻtiennes d’accepter le droit et de vivre selon les normes sociales qu’elles s’imposent elles-mĂȘmes. Ce rapport difficile au droit et Ă  la source de toutes nos barbaries Ă©talĂ©es Ă  la face du monde.

Comment peut-on donner des lois, une constitution Ă  des Ă©lites qui ne les veulent pas et ne les respectent pas ? Les Ă©lites haĂŻtiennes sont des Ă©lites sauvages. Peut-on donner des lois Ă  des sauvages ? C’est comme jeter des perles Ă  des cochons. La loi est une question de civilisation. Le respect de la loi est une question d’Ă©ducation. Il faut apprendre aux Ă©lites haĂŻtiennes Ă  aimer la loi et Ă  la vouloir. Pour que nos lois soient respectĂ©es, il faut une politique. Et la premiĂšre partie de la politique, c’est l’Ă©ducation. Alors, formez des hommes et des femmes, et tout ira bien.

La Constitution de 1987 a un sombre bilan en ce qui concerne son exĂ©cution. Elle n’a jamais Ă©tĂ© respectĂ©e parce que les Ă©lites haĂŻtiennes sont incapables d’Ă©voluer dans une sociĂ©tĂ© haĂŻtienne dominĂ©e par les principes dĂ©mocratiques, l’État de droit et la bonne gouvernance. Une constitution, politiquement acceptable et techniquement bien rĂ©digĂ©e, ne sera jamais appliquĂ©e chez nous tant que les mentalitĂ©s des Ă©lites dirigeantes et dominantes haĂŻtiennes resteront dans l’Ă©tat actuel.

Élaborer une constitution maintenant, avec toutes les garanties politiques et techniques, c’est s’exposer Ă  ce qu’elle soit « mangĂ©e » dans trois ans. Les « mangeurs de constitution » sont ces acteurs dominants du chaos, ceux-lĂ  mĂȘmes qui dominent la scĂšne politique haĂŻtienne depuis trois dĂ©cennies. Ce sont les mĂȘmes acteurs qui ont portĂ© tous les coups contre la dĂ©mocratie libĂ©rale, Ă  qui l’on confie dĂ©sormais la responsabilitĂ© de rĂ©diger une nouvelle constitution, alors qu’ils n’ont aucune compĂ©tence Ă©prouvĂ©e en matiĂšre constitutionnelle. Une dĂ©marche pervertie d’avance ! Soyons pour une fois sĂ©rieux !

Sortir de cette perversion nĂ©cessite d’offrir au pays une nouvelle grille d’analyse, scientifiquement fondĂ©e, en matiĂšre constitutionnelle. Notre dĂ©marche consiste Ă  dĂ©construire le travail du groupe de travail sur la rĂ©forme constitutionnelle initiĂ© par le gouvernement de facto actuel, en mettant en Ă©vidence ses limites et ses faiblesses, et en dĂ©nonçant son absence de pertinence thĂ©orique, c’est-Ă -dire l’ignorance du rĂ©gime politique haĂŻtien tel qu’il est dĂ©fini par la Constitution de 1987. Cette mĂ©connaissance du texte originel mĂšne Ă  une analyse qui le dĂ©nature.

L’analyse que nous livre le groupe de travail sur la Constitution, parce qu’elle est en dehors de la plaque, ne peut en aucun servir de rĂ©fĂ©rence pour rĂ©diger un nouveau projet de constitution. Les justifications apportĂ©es pour supprimer la constitution de maniĂšre illĂ©gale sont globalement erronĂ©es. Ce qui nous amĂšne Ă  faire les considĂ©rations qui suivent de maniĂšre Ă  faire comprendre que le texte de 1987 est victime de la mauvaise propagande des Ă©lites rĂ©trogrades haĂŻtiennes au service des Ă©lites globalistes.

La Constitution de 1987 dĂ©finit un rĂ©gime parlementaire, prenant en compte des problĂšmes politiques et historiques qui ont favorisĂ© l’exercice d’un pouvoir exĂ©cutif omnipotent, entravant ainsi de maniĂšre continue l’avĂšnement d’un État de droit en HaĂŻti, oĂč gouvernants et gouvernĂ©s doivent se soumettre aux mĂȘmes exigences de la loi.

Contrairement Ă  ce que suggĂšrent les travaux du groupe de travail sur la Constitution, la Constitution de 1987 n’a pas diminuĂ© l’importance de l’institution prĂ©sidentielle en HaĂŻti. En rĂ©alitĂ©, elle a remplacĂ© la force suprĂȘme du pouvoir prĂ©sidentiel par celle des principes de l’État de droit. Sur cette question fondamentale, qui Ă©chappe largement Ă  la rĂ©flexion de nos meilleurs juristes haĂŻtiens, les concepteurs de la Constitution française de 1958 auraient beaucoup Ă  apprendre de nos constituants haĂŻtiens. Qui doit inspirer qui ?

On peut se demander aisĂ©ment : la France est-elle un État de droit et en quoi la Constitution française de 1958, Ă  laquelle certains juristes haĂŻtiens se rĂ©fĂšrent pour juger de la pertinence de celle d’HaĂŻti, et concluent Ă  sa non validitĂ© opĂ©rationnelle, favorise-t-elle un vĂ©ritable État de droit en France ? Ces questions ne sont pas sans fondement pour ceux qui souhaitent interroger le droit de l’ancienne puissance coloniale. La modernisation du droit n’est pas synonyme d’occidentalisation du droit, comme l’a Ă©crit le Dr JosuĂ© Pierre-Louis.

Des reproches infondés
Les personnalitĂ©s impliquĂ©es dans la rĂ©vision de la Constitution de 1987 justifient son Ă©cartement en avançant qu’elle a provoquĂ© un dĂ©sĂ©quilibre entre les pouvoirs exĂ©cutif et lĂ©gislatif, au dĂ©triment de ce dernier. Cependant, il n’en est rien. RĂ©tablir l’équilibre entre les deux branches du pouvoir politique de l’État aurait impliquĂ© de permettre au prĂ©sident de la RĂ©publique de disposer du droit de dissoudre le Parlement, comme c’est le cas en France avec la Constitution de la Ve RĂ©publique. C’est, selon l’ancien professeur de droit constitutionnel, Dr Monferrier Dorval, la seule maniĂšre de rationaliser le rĂ©gime politique haĂŻtien et d’assurer l’équilibre entre les pouvoirs.

Nous avons un avis fondamentalement diffĂ©rent. Le droit de dissolution va Ă  l’encontre du principe de l’égalitĂ© politique, qui est l’expression mĂȘme de l’exercice du suffrage universel. Ce droit sacrĂ© du peuple ne peut ĂȘtre remis en cause, sauf dans le cas oĂč un Ă©lu se rend indigne de la confiance que le peuple, dĂ©positaire de la souverainetĂ©, a placĂ©e en lui. Le principe de non-dissolution est un garant essentiel de l’État de droit.

Permettre au PrĂ©sident de la rĂ©publique, Ă©lu au suffrage universel, de disposer du droit de dissoudre le parlement, alors que les membres de cette instance partagent la mĂȘme source de lĂ©gitimitĂ© que lui, n’est pas la meilleure façon de mettre fin au blocage politique, de rĂ©soudre les problĂšmes liĂ©s aux nĂ©gociations politiques entre parlementaires lors du choix et de la ratification du Premier ministre ainsi que de sa dĂ©claration de politique gĂ©nĂ©rale. Cette analyse trop simpliste ne rĂ©siste pas Ă  l’examen.

En rĂ©alitĂ©, le rĂ©gime politique haĂŻtien a Ă©tĂ© perverti par les politiciens traditionnels haĂŻtiens, obsĂ©dĂ©s par leur dĂ©sir de pouvoir personnel et leur quĂȘte de l’argent facile. La crĂ©ation d’une commission de conciliation instituĂ©e dans le texte originel pour rĂ©soudre les conflits entre les deux instances politiques reprĂ©sente une grande innovation politique. Elle incite les dirigeants Ă  privilĂ©gier le dialogue permanent pour surmonter les obstacles majeurs auxquels le pays est confrontĂ©. Ce recours au dialogue, par l’intermĂ©diaire de cette commission, renforce l’indĂ©pendance des pouvoirs, dont la cohĂ©sion garantit l’unitĂ© de la souverainetĂ© nationale.

Se rĂ©fĂ©rant Ă  la logique du groupe de travail sur la constitution, rationaliser le rĂ©gime politique haĂŻtien reviendrait Ă  en dĂ©finir la raison d’ĂȘtre. Une telle analyse implique que ce rĂ©gime dĂ©fini par la constitution de 1987 n’avait pas de raison d’ĂȘtre et qu’il n’avait pas pour objectif de rĂ©soudre les problĂšmes qui se posaient aprĂšs le dĂ©part de la dictature. RĂ©flĂ©chir ainsi, c’est dire carrĂ©ment que le texte de 1987 Ă©tait simplement bon pour la poubelle.

Peut-on, en effet, rĂ©soudre le problĂšme de la rationalitĂ© haĂŻtienne Ă  partir de la rationalitĂ© française, croyant que la nĂŽtre semble frappĂ©e d’une sorte de dĂ©faillance de la raison ? En d’autres termes, peut-on Ă©riger la rationalitĂ© française comme juge de la rationalitĂ© haĂŻtienne ? Qui doit inspirer l’autre ? Qui parle pour qui ?

Les constituants français, Ă  travers le texte de 1958 qui fondait la 5e RĂ©publique, devaient rĂ©soudre les problĂšmes auxquels la France Ă©tait confrontĂ©e. À la base de ce texte, il y avait une rationalitĂ© française incontestable, visant Ă  rĂ©soudre les problĂšmes de gouvernance de la France depuis la IVe RĂ©publique. En 1987, HaĂŻti, avec sa nouvelle constitution, avait pour tĂąche de rĂ©gler ses propres problĂšmes de gouvernance, aprĂšs plus de trente ans de pouvoir autoritaire du rĂ©gime des Duvalier. Cela sous-entend qu’il existe une rationalitĂ© Ă  la base du rĂ©gime politique haĂŻtien, qui est tout Ă  fait diffĂ©rente de celle de la France.

La Constitution haĂŻtienne de 1987, de mĂȘme que celle de la France de 1958, n’a pas Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e dans un vide factuel. Il y a toujours une raison derriĂšre la loi, comme l’a Ă©crit mon ancienne professeure de droit constitutionnel, Mme Daniel Pinard. Ces raisons peuvent ĂȘtre philosophiques, historiques, politiques, Ă©conomiques, culturelles, etc. L’ensemble de ces causes constitue l’esprit gĂ©nĂ©ral de la nation, qui rĂ©sonne dans sa Constitution et ses lois. Tout ceci constitue le fond naturel du peuple. Celui-ci engendre des normes singuliĂšres qui ne semblent pas susceptibles d’ĂȘtre jugĂ©es Ă  l’aune d’une rationalitĂ© ou d’une moralitĂ© universelle.

Ne confondons pas la France avec HaĂŻti, sa rationalitĂ© avec la nĂŽtre. Les Ă©motions d’un peuple deviennent des faits, et les individus qui forment la collectivitĂ© nationale ne sauraient ĂȘtre rĂ©gis en laissant de cĂŽtĂ© leurs Ă©motions et leurs sensibilitĂ©s culturelles. Telle est donc la rĂ©sonance de la post-modernitĂ©, qui remet en question l’idĂ©e d’une transcendance de la raison, notamment la raison juridique. « Chaque nation, selon Montesquieu, possĂšde son fond naturel » par lequel le peuple construit sa raison pour s’Ă©lever Ă  des « buts supĂ©rieurs », pour rĂ©pĂ©ter Hegel.

Les freins et contrepoids de notre Loi-mĂšre
Les freins et les contre-pouvoirs Ă©tablis dans la constitution de 1987 ont toujours leur raison d’ĂȘtre. La dĂ©mocratie n’est pas acquise une fois pour toutes. L’État de droit est une quĂȘte incessante. La tentation dictatoriale des HaĂŻtiens n’a pas disparu aprĂšs ces trois dĂ©cennies qui ont vu le dĂ©part des Duvalier. Au contraire, l’appĂ©tit pour le pouvoir hors norme augmente chez les dirigeants haĂŻtiens, qui ne se retiennent pas. Un gouvernant, disait Albert Camus, est celui qui s’empĂȘche, qui se limite. L’expĂ©rience de ces trois dĂ©cennies dĂ©montre de maniĂšre Ă©loquente que les dirigeants haĂŻtiens n’ont pas de limite. Ils franchissent toutes les limites, mĂȘme celles qui sont Ă©tablies par nos lois. Il est aberrant de supprimer une constitution qui impose des limites Ă  des dirigeants pour en fabriquer une autre, afin qu’elle soit conforme aux rĂ©flexes autoritaires de nos dirigeants.

L’établissement des contrepoids dans la Charte fondamentale a Ă©tĂ© une mesure de pondĂ©ration et de modĂ©ration de l’exercice du pouvoir exĂ©cutif, s’inscrivant dans la vision des penseurs et philosophes du XVIIIe siĂšcle, qui croyaient que la dictature ne pouvait venir que de l’exĂ©cutif. InfluencĂ©s par les rĂ©flexions de ces derniers, les constituants de 1987 ont crĂ©Ă© un exĂ©cutif bicĂ©phale, une gouvernance Ă  deux tĂȘtes oĂč les fonctions du PrĂ©sident de la RĂ©publique et celles du Premier ministre sont complĂštement distinctes et sĂ©parĂ©es. Le PrĂ©sident, qui nomme le Premier ministre dans les conditions prĂ©vues par la Constitution, n’a pas le pouvoir de le rĂ©voquer, ce qui ne constitue pas un dilemme, comme l’a compris l’historien Claude Moise. Le PrĂ©sident, fort du mandat populaire qu’il a obtenu lors de sa campagne Ă©lectorale, estime souvent pouvoir tout permettre et devient anxieux face au Premier ministre qu’il a nommĂ©, qui joue le rĂŽle de contrepoids.

La gouvernance Ă  deux tĂȘtes est un systĂšme de remorquage dans lequel l’un doit tenir compte de l’autre pour fonctionner. Le PrĂ©sident de la RĂ©publique, Ă©lu au suffrage universel direct, n’est pas plus lĂ©gitime que le Premier ministre, qui bĂ©nĂ©ficie lui-mĂȘme de la confiance du Parlement, reprĂ©sentant l’ensemble des Ă©lus de la RĂ©publique. Ce dernier, bĂ©nĂ©ficiant d’une double lĂ©gitimitĂ©, constitue un vĂ©ritable contrepoids au PrĂ©sident de la RĂ©publique. Cet attelage entre la prĂ©sidence et la primature exige que les mentalitĂ©s politiques Ă©voluent pour garantir le bon fonctionnement de l’État et de la dĂ©mocratie. Dans ce cadre, les conflits doivent ĂȘtre gĂ©rĂ©s de maniĂšre lĂ©gale et pacifique.

Sur la question du Parlement, contrairement Ă  ce que justifie le groupe de travail sur la Constitution, le pouvoir lĂ©gislatif n’est pas celui qui dĂ©tient tous les pouvoirs. Le pouvoir de rĂ©voquer le gouvernement sans que le droit de dissolution ne soit donnĂ© au PrĂ©sident pour Ă©tablir un Ă©quilibre entre les deux pouvoirs politiques, ne place pas le pouvoir lĂ©gislatif dans une situation hĂ©gĂ©monique par rapport Ă  l’exĂ©cutif. Le Parlement haĂŻtien, Ă  l’instar de tous les parlements du monde, remplit trois fonctions : la fonction d’élaboration des lois sur les affaires d’intĂ©rĂȘt public, la fonction de contrĂŽle sur les actions du gouvernement, et la fonction juridictionnelle, qui permet de mettre en accusation les responsables de l’État coupables de dĂ©lits et de crimes dans l’exercice de leurs fonctions.

Pourquoi Ă©liminer le sĂ©nat haĂŻtien, l’une des plus vieilles institutions de l’AmĂ©rique, sous prĂ©texte que le coĂ»t de la mise en Ɠuvre de l’ensemble du texte constitutionnel serait trop Ă©levĂ© ? Une dĂ©mocratie digne de ce nom ne doit-elle pas se donner des moyens ? Qui a rĂ©alisĂ© l’étude du coĂ»t de la mise en Ɠuvre de la constitution qu’on souhaite imposer Ă  la nation par rapport aux rĂ©sultats attendus ?

En quoi le Parlement serait-il tout-puissant ou nuisible Ă  la dĂ©mocratie ? On peut tout de mĂȘme regretter que les membres du pouvoir lĂ©gislatif soient irresponsables. En dĂ©mocratie, il n’y a pas de pouvoir sans responsabilitĂ©. C’est une situation Ă  corriger dans le cadre d’un amendement constitutionnel.

Il est totalement incorrect de dire que le pouvoir exĂ©cutif est dĂ©muni ou rabaissĂ©. Le prĂ©sident Ă©lu sous l’égide de la Constitution de 1987 dĂ©tient de rĂ©els pouvoirs, avait soulignĂ© l’ancien PrĂ©sident Leslie Manigat. La question qui se pose est la suivante : sait-il comment les exercer ? En termes de pouvoirs, la Constitution de 1987 n’a pas diminuĂ© l’importance de l’institution prĂ©sidentielle. De maniĂšre thĂ©orique, le pouvoir le plus important dans la Constitution de 1987 est le pouvoir judiciaire, qui a Ă©tĂ© relĂ©guĂ© au rang d’autoritĂ© judiciaire, comme c’est le cas en France, par trois lois sur la magistrature haĂŻtienne.

Je constate que les acteurs politiques ne connaissent pas suffisamment la Constitution de 1987. Cette Constitution a fait du pouvoir judiciaire un pouvoir d’équilibre. À travers la Cour de cassation, il corrige les actes du Parlement dans son pouvoir consistant Ă  assurer la suprĂ©matie de la Constitution et de la rĂšgle de droit, ceux de l’administration via la Cour supĂ©rieure des comptes et du contentieux administratif, laquelle est placĂ©e sous son autoritĂ©. La Cour de cassation est l’instance garante de l’unitĂ© nationale et de la dĂ©centralisation, des droits et libertĂ©s et des valeurs dĂ©mocratiques. C’est une vĂ©ritable Cour suprĂȘme.

En ce qui concerne la crĂ©ation d’un Conseil constitutionnel Ă  la française ou d’une Cour constitutionnelle en HaĂŻti, il est pertinent de se demander si un tel Conseil constitutionnel serait justifiĂ©, Ă©tant donnĂ© la prĂ©sence d’une Cour suprĂȘme et d’un pouvoir judiciaire indĂ©pendant, dont la fonction relĂšve de la souverainetĂ© nationale. Il est important de rappeler que, dans le domaine du droit, les institutions et les concepts sont toujours ancrĂ©s dans une thĂ©orie, une vision ou une philosophie particuliĂšre. DĂšs lors, sur quelle base repose la vision du droit et de la justice en HaĂŻti ? Quel cadre thĂ©orique a-t-on choisi pour dĂ©velopper cette vision ?

Les rĂ©ponses tardent Ă  venir. Le groupe de travail sur la Constitution suggĂšre de reproduire le modĂšle français en sĂ©parant l’ordre judiciaire de l’ordre administratif. Cependant, en dĂ©mocratie, peut-on rĂ©ellement recruter les membres d’un organe d’État par concours ? Il existe donc une difficultĂ© intellectuelle Ă  rĂ©soudre. Nous copions sans toujours en saisir le sens profond. Il est important de dĂ©noncer cette indulgence intellectuelle qui se manifeste aujourd’hui parmi nos Ă©lites.

Les acteurs politiques et de la sociĂ©tĂ© civile doivent donc commencer par apprendre Ă  connaĂźtre la Constitution haĂŻtienne de 1987 avant de penser Ă  la changer. Il est en effet impossible de changer une rĂ©alitĂ© qu’on ne comprend pas. Les Ă©lites locales doivent dĂ©sapprendre pour rĂ©apprendre afin de pouvoir agir sur la rĂ©alitĂ© qu’elles souhaitent changer.

En ce qui concerne les collectivitĂ©s territoriales, le groupe de travail propose de rĂ©duire ou d’Ă©liminer le Conseil municipal de trois membres et d’avoir un reprĂ©sentant unique pour la commune afin d’Ă©viter toute possibilitĂ© de conflit entre les membres. Cette proposition, liĂ©e Ă  d’autres, n’est rien d’autre qu’une tentative de renforcer le pouvoir autoritaire et personnel Ă  tous les niveaux de la gouvernance du pays. Il est prouvĂ© scientifiquement que plus le travail est grand, colossal, intellectuellement difficile et complexe, plus il demande d’intelligence et de synergie. Le travail en groupe est un travail didactiquement organisĂ©, pour lequel on espĂšre trouver un rĂ©sultat plus efficace et plus performant. Par exemple, au Tribunal de premiĂšre instance, on trouve un juge. À la Cour d’appel et en cassation, c’est un collĂšge de juges qui rend la dĂ©cision.

De magouilles en magouilles
Le groupe de travail sur la Constitution propose la transposition de certaines institutions françaises et de certains Ă©lĂ©ments du rĂ©gime prĂ©sidentiel, combinĂ©s avec ceux de certains pays africains, dans la nouvelle Constitution qui devrait structurer notre systĂšme juridique. C’est essentiellement une imitation, masquĂ©e sous un vernis politique, qui inclut des propositions telles que l’extension du droit de vote Ă  la diaspora et la question dĂ©licate de la double nationalitĂ©. Cette derniĂšre suscite des conflits de loyautĂ©s, d’allĂ©geances notamment en ce qui concerne la souverainetĂ© nationale et les principes du droit international, un dĂ©bat qui n’est toujours pas rĂ©solu.

L’Ă©laboration d’une constitution est intimement liĂ©e au concept d’État souverain. Or, l’État haĂŻtien est effondrĂ©, et Ă  sa tĂȘte se trouve un gouvernement illĂ©gal et illĂ©gitime, corrompu, sous contrĂŽle Ă©tranger. Dans un tel contexte, comment les HaĂŻtiens pourraient-ils se doter d’une nouvelle Constitution alors que le pays est plongĂ© dans la plus grave crise de souverainetĂ© de son histoire ? Quel est le fondement d’une telle dĂ©marche, lancĂ©e par des Ă©lites qui, depuis trois dĂ©cennies, ont toujours entretenu un rapport difficile avec la Constitution de 1987, qu’elles ont constamment violĂ©e et mĂ©prisĂ©e ? Ceux qui insistent pour changer cette Constitution, estimant qu’elle est inapplicable pour les raisons qu’ils avancent, doivent enfin se rendre Ă  l’Ă©vidence : non seulement le moment n’est pas propice, mais ils risquent d’ĂȘtre accusĂ©s de haute trahison.

Le Conseil prĂ©sidentiel de transition (CPT), par un acte d’imposture, a prĂȘtĂ© serment sur la Constitution de 1987 sans lien avec celle-ci, au Palais national, Ă  la barbe des reprĂ©sentants de la communautĂ© internationale, sa seule source de lĂ©gitimitĂ©. Pourtant, pendant ces dix mois de gouvernance dĂ©sastreuse, marquĂ©e par une corruption Ă  grande Ă©chelle, il n’a cessĂ© de s’y rĂ©fĂ©rer pour prendre des dĂ©cisions qu’il considĂšre importantes. Comment ce mĂȘme CPT peut-il maintenant dĂ©cider de l’abroger pour en rĂ©diger une nouvelle ? Cette situation semble ĂȘtre une succession de magouilles, de manipulations, de palinodies et de contradictions, qui soulignent une incohĂ©rence flagrante.

Les militaires qui ont assurĂ© la transition politique aprĂšs le dĂ©part des Duvaliers en 1986 Ă©taient, de loin, plus brillants et plus compĂ©tents que les dirigeants actuels. La constitution de 1987 avait bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une double lĂ©gitimitĂ© : le peuple avait non seulement dĂ©signĂ© les rĂ©dacteurs, mais il avait Ă©galement validĂ© le travail de l’AssemblĂ©e constituante par un rĂ©fĂ©rendum populaire. Comment des gouvernants de facto, illĂ©gitimes, peuvent-ils, sous pression internationale, dĂ©cider de supprimer la constitution que le peuple a lui-mĂȘme rĂ©digĂ©e et adoptĂ©e ? Pourquoi une confĂ©rence nationale, dont l’objectif serait de supprimer cette Loi-mĂšre, alors que des ressources considĂ©rables ont Ă©tĂ© investies dans sa rĂ©daction, dans une indiffĂ©rence totale Ă  la dĂ©tresse populaire, alors que le peuple haĂŻtien, depuis 1986, a dĂ©jĂ  adhĂ©rĂ© aux principes de la dĂ©mocratie libĂ©rale, de l’État de droit et de la bonne gouvernance ? OĂč sont passĂ©s les concepts de dĂ©mocratie, de pluralisme politique et idĂ©ologique ?

Le texte de 1987 n’est certes pas parfait, mais rappelons-nous que la Constitution des États-Unis, datant de 1787, a subi 27 amendements. AprĂšs plus de deux siĂšcles d’existence, elle est devenue une Ɠuvre rĂ©flĂ©chie et mĂ»rie. Le travail intellectuel est un travail patient, ce n’est pas un simple exercice de petits ajustements cosmĂ©tiques. Vingt-trois constitutions dans notre histoire politique, c’est trop. Cela soulĂšve un problĂšme rĂ©current de gouvernance et de gestion de l’État.

Quelle constitution pour HaĂŻti ?
Notre constitution a trois dĂ©cennies d’existence. Ce fut un travail apprĂ©ciable malgrĂ© ses imperfections. Elle reste une constitution qui a liĂ© chaque HaĂŻtien au destin de son pays Ă  travers un vaste projet de dĂ©centralisation, qui aurait pu favoriser l’Ă©mergence d’Ă©lites locales dans la gestion de leurs communautĂ©s. Cette constitution aurait pu devenir une Ɠuvre de fiertĂ© nationale pour tous les HaĂŻtiens, si elle avait Ă©tĂ© Ă©purĂ©e et constamment rĂ©visĂ©e en tenant compte des Ă©volutions et des mutations de la sociĂ©tĂ©. Malheureusement, le rĂ©flexe de nos intellectuels et de nos gouvernants est de copier servilement tout ce qui vient d’ailleurs. Je dĂ©teste la servilitĂ© !

La Constitution de 1987, quoi qu’on en dise, a fait ses preuves. Elle a empĂȘchĂ©, malgrĂ© les tentatives autoritaires de certains, un retour Ă  la dictature et au totalitarisme. Ce n’est pas l’exĂ©cutif qui manque de pouvoir, c’est le pouvoir politique, Ă  l’Ă©chelle mondiale, qui est aujourd’hui fragmentĂ© face Ă  la nouvelle rĂ©alitĂ© globale et Ă  un monde qui exige plus de droits. Les droits de l’homme, finalitĂ© de l’histoire, ont d’ailleurs occupĂ© une place centrale dans notre constitution, qui leur a consacrĂ© un chapitre entier.

La meilleure constitution n’est pas nĂ©cessairement celle qui Ă©tablit un rĂ©gime parlementaire ou prĂ©sidentiel. HaĂŻti, Ă  travers son histoire politique, a fait l’expĂ©rience de toutes les formes de gouvernement. L’expĂ©rience politique d’HaĂŻti, pendant deux siĂšcles d’histoire, a Ă©tĂ© marquĂ©e par des coups d’État et des dictatures. Il est donc erronĂ©, tant sur le plan politique qu’historique, de croire que la transposition du modĂšle amĂ©ricain soit l’exemple parfait ou le seul qui puisse offrir des conditions de gouvernance stable en HaĂŻti. Le rĂȘve amĂ©ricain, qui n’est autre que l’esprit du peuple amĂ©ricain, ne peut ĂȘtre vĂ©cu qu’à l’intĂ©rieur du territoire amĂ©ricain. Notre travail consiste Ă  rechercher l’esprit gĂ©nĂ©ral de la nation haĂŻtienne afin de lui offrir des institutions politiques adaptĂ©es Ă  ses besoins pour son dĂ©veloppement Ă©conomique et social.

La meilleure constitution est celle capable de favoriser le dĂ©veloppement Ă©conomique, la croissance et de crĂ©er des emplois durables. Ce sont ces critĂšres qui doivent servir Ă  Ă©valuer le succĂšs d’une constitution. Elle doit Ă©galement ĂȘtre le reflet de nos sensibilitĂ©s locales, de notre mode de vie et de la maniĂšre dont nous souhaitons ĂȘtre gouvernĂ©s.

La meilleure loi fondamentale pour HaĂŻti est celle qui nous permet de demeurer dans l’arc rĂ©publicain, qui respecte les principes dĂ©mocratiques, l’État de droit, la bonne gouvernance et garantit le respect des droits fondamentaux.

Le problĂšme, c’est qu’HaĂŻti ne dispose pas d’une Ă©lite capable de faire respecter ces principes. On ne peut pas offrir une constitution et des lois Ă  des Ă©lites qui ne les respectent pas. HaĂŻti est en panne d’hommes et de femmes capables d’instaurer un État moderne dominĂ© par l’ordre. Je ne cesserai de rĂ©pĂ©ter qu’il est crucial d’éduquer les Ă©lites haĂŻtiennes sur de nouvelles bases : le patriotisme, l’intĂ©gritĂ© et la solidaritĂ©.

Cette rĂ©demption tant attendue pour notre nation commence par l’éducation des Ă©lites haĂŻtiennes destinĂ©es Ă  gouverner notre pays. Quelle est donc la premiĂšre partie de la politique, demande un jour l’historien français Jules Michelet ? L’éducation. La deuxiĂšme partie de la politique, l’éducation. Et la troisiĂšme partie de la politique, l’éducation
 Alors, conclut-il, faites des hommes, et tout ira bien. Par l’Ă©ducation, on fortifie les principes des lois et le levier moral, le plus puissant de la sociĂ©tĂ©, qui est celui des hommes d’État.

L’histoire retiendra de ces hommes politiques, non pas globalement, mais majoritairement, qu’aprĂšs avoir pillĂ© la rĂ©publique pendant trois dĂ©cennies, sur ses dĂ©pouilles, ils proposent Ă  la nation, Ă  travers un projet de constitution, leur propre dictature aprĂšs celle des Duvalier. L’histoire d’HaĂŻti, celle de ces Ă©lites corrompues et rĂ©trogrades, n’est-elle pas une suite d’horreurs interminables ?

Sonet Saint-Louis av
Professeur de droit constitutionnel Ă  la facultĂ© de droit et des sciences Ă©conomiques de l’UniversitĂ© d’Etat d’HaĂŻti.
Professeur de philosophie.
Sous les bambous,
La Gonave, 11février 2025
Tel 44073580
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